Comment gagner en force en ménageant ses cartilages ?

Il y a peu se terminait à Paris le stage « Cartilage » de Blandine Calais-Germain. 

Après avoir reçu cette formation avec Blandine, j’ai eu la chance cette année d’enseigner ce stage au côté de François Germain spécialiste en biomécanique. 

C’est la première partie du cursus de la méthode Sinovi®. Ses contenus sont également indispensables pour les personnes suivant le cycle Seniors & Mouvement®. On y apprend notamment à repérer les mouvements potentiellement problématiques pour la santé des cartilages et des principes qui favorisent leur entretien. 

J’aimerais vous donner dans cet article quelques informations qui en sont tirées. Elles pourront vous aider dans la conception de vos cours seniors ou si vous présentez des douleurs articulaires et que vous voulez développer votre force. Je vous montrerai aussi comment dans Seniors & Mouvement® nous utilisons ces apports pour amener ce travail chez les personnes âgées de manière confortable et sécuritaire. 

Être plus fort en vieillissant, c'est possible

Chez les personnes âgées, conserver voire augmenter la force des membres inférieurs est primordial. Elle est nécessaire pour la locomotion, l’équilibre, pour se lever facilement. Il est donc conseillé d’intégrer dans son quotidien ou lors de séances d’entraînement des exercices qui la sollicitent. Selon les cas on pourra l’entretenir voir l’améliorer et parfois seulement ralentir sa diminution. 

Plusieurs d’études montrent qu’un cycle de musculation avec des charges correspondant à 80 % de la force maximale pouvait produire des résultats impressionnants et très encourageants. L’étude de Frontera et coll (1988) observe un accroissement de 107 % sur la force de l’extension genoux sur des sujets âgées de 60 à 72 ans. Une autre expérience (Lexell et coll, 1995) témoigne d’une augmentation de 163 % toujours pour l’extension de genou. Fiatarone et coll (1990) montre pour des personnes de 90 ans une progression de 174 %, tout cela en quelques semaines ! 

Ceci est particulièrement vrai pour les individus sédentaires qui se mettent à l’activité et dont les articulations peuvent supporter un tel entraînement. Sachez aussi que passé 12 semaines d’entraînement, les progrès deviennent moindres et l’exercice permettra surtout de freiner la perte en force. 

Étonnement, ce type d’exercice n’est pas du tout généralisé. 

Pourquoi les gym douces ne sont pas suffisantes

Le bon sens nous fait dire que les personnes âgées devraient suivre des séances peu intenses, car elle serait adaptée à leur état. C’est souvent ce qu’on trouve dans les cours « seniors », « sur chaise » ou encore « équilibre ». Recommander des cours de gymnastique douce semble à première vue apparaître comme la meilleure idée.

Pourtant la littérature scientifique montre que les pratiques à haute intensité devraient avoir une place première dans les activités physiques pour les personnes âgées. Soulignons que ce constat n’enlève pas l’intérêt de participer à d’autres types de cours (stretching, équilibre, mémoire…). Cependant plusieurs problèmes peuvent se poser quand on veut mettre en place ce type de séances.

Nous verrons dans un prochain article qu’il est possible (et souhaitable) dans une même séance de faire cohabiter différentes thématiques. C’est une des particularités de la méthode Seniors & Mouvement®.

Quelles sont les difficultés à mener un cours à haute intensité ?

D’abord se pose le problème des prérogatives et de l’accès au matériel. Pour enseigner la musculation avec poids et machines, des diplômes spécifiques sont requis, par exemple le BPJEPS AGFF. Par ailleurs, on n’a pas forcément à disposition tout l’équipement nécessaire.

Ensuite arrive la question de la santé articulaire des participant·e·s à nos séances. Très souvent, la douleur générée par le travail en charge lourde empêche tout simplement ce genre d’entraînement. Il existe donc tout un art de préparation, d’agencement, de progression et de récupération pour que les séances soient vécues avec plaisir et confort. Limiter les risques de dégradations des cartilages doit aussi faire partie des préoccupations premières.

Pour finir, dans nos cours on va chercher comment obtenir un haut niveau d’intensité, surtout si on n’a pas accès à des machines de musculation.

Comment préserver nos cartilages ?

Plusieurs éléments vont amener des contraintes pour les tissus cartilagineux : les chocs, la compression, le mouvement, la répétition. Ces contraintes si elles sont proposées en équilibre avec les capacités de régénération du cartilage pourront lui être très profitables. Mais si ces stimulations dépassent ses possibilités de renouvellement, cela va entraîner sa destruction. Pour les personnes âgées, on peut considérer que ça risque d’être très rapidement le cas. D’autre part, ayez en tête que sur un cartilage déjà abimé on a une marge de manœuvre très réduite.

Heureusement, des solutions existent.

D’abord, on cherche à éviter de cumuler les contraintes. Par exemple si on choisit une pratique qui compresse beaucoup le cartilage on va enlever la composante du mouvement. Dans l’autre sens, si on sélectionne un mouvement avec beaucoup de répétitions, on va limiter la compression. Toutefois, pour rester dans l’entraînement de la force l’intensité ne doit pas trop baisser. Dans ce cas, on passerait alors dans un travail d’endurance cardiovasculaire, ce qui est très intéressant en soi, mais pas le projet ici.

Pruitt et coll (1995) montrent qu’on peut gagner en force de manière significative avec des charges réduites (40 % de la force maximale) en augmentant le nombre de répétitions. S’entraîner à 60 % de la force maximale semble un bon compromis entre charge et nombre de répétitions.

Au final, je trouve intéressant de savoir naviguer parmi tous ces paramètres en s’appuyant sur les retours de nos pratiquants.

Ensuite, on peut amener des pratiques participants à l’entretien du cartilage.

Par exemple :

– du relâchement musculaire (pas de mouvement et pas de compression) ;

– des mouvements passifs (du mouvement sans compression) ;

– des mouvements alternant coaptation et dé-coaptation (alternance de compression et de décompression).

Dans Seniors & Mouvement®, Nous joueons beaucoup au sein d’une même séance avec les moments de contraintes et de récupération. Souvent, ils sont insérés ou combinés avec l’exploration d’autres thématiques tels que la coordination, la mémoire, la spatialisation…

Une de nos préoccupations (qui nous vient du travail de Blandine Calais-Germain) est de mettre en place des situations qui vont favoriser la trophicité des tissus. Tout ce qui va profiter aux muscles, aux os (en particulier la circulation des liquides), profitera aux cartilages. 

À vous de pratiquer 😉

Pour mettre tout cela en pratique, je vous invite à suivre une séance courte et commentée pour le renforcement des jambes. Elle sera l’occasion de vous faire découvrir notre chaîne YouTube. 

Elle est composée d’un échauffement et de la mise en alternance de moments sollicitant la force en isométrie et d’autres qui combinent mouvement et non-compression. 

Pour aller plus loin : rendez-vous au stage « Marche et relevés ».

Faites-nous vos retours dans les commentaires pour ce qui concerne l’article et sur YouTube pour la mise en pratique. 

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Cet article a 2 commentaires

  1. Bonjour
    Je suis d’accord qu’il faut évoluer dans l’appriori ‘sénior est égal à gym douce sans intensité’ et qu’il n’y a pas forcément besoin d’une salle de musculation pour y arriver. Reste les questions relatives au rythme cardiaque, aux crampes, à l’alimentation, aux contraintes osteoarticulaires, à l’accompagnement etc, sujet à partager en tout cas merci pour cet article motivé et motivant.

    1. Merci Isabelle pour ton commentaire 🙂
      Sur la question cardiaque il faudra surtout rester en dessous de 6 secondes en travail isométrique surtout si les personnes arrivent à recruter fortement leur musculature. Garder une respiration fluide est important également.

      Concernant l’alimentation c’est un grand sujet car il est clair que la nutrition (et repos) est une des composantes essentielles au développement musculaire chez les âgés. Pour l’osthéo-articulaire il faut beaucoup individualiser, être progressif et avoir les bons outils 😉

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